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Aux origines de la route Nationale 13, la colonne vertébrale de la Normandie

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La route nationale 13, près de la Rivière-Thibouville (Eure).

La route Nationale 13, près de la Rivière-Thibouville (Eure). (© Laurent Ridel)

Les riverains continuent à l’appeler familièrement « la 13 ». Tant pis si l’Etat a récemment déclassé certains tronçons en départementales aux noms plus compliqués (D 113, D 613, D 974…). Traversant toute la Normandie d’est en ouest, cet axe routier emmène l’automobiliste de Paris à Cherbourg, de la porte Maillot aux rivages du Cotentin. Nous lui consacrons un article historique, à défaut de lui dédier une chanson comme fit Charles Trenet pour la Nationale 7.

Au plus court

Au début du règne de Louis XV, l’état du réseau routier désole les grands voyageurs : à cause des multiples ornières, les voitures à cheval avancent au trot voire au pas ; des ponts restent en ruine, obligeant les voyageurs à trouver un gué. Autant de goulots d’étranglement pour l’administration et pour le commerce. 

Ça ne peut plus durer. S’appuyant sur la toute nouvelle administration des Ponts et Chaussées, le contrôleur général des finances, Philibert Orry ambitionne de doter le royaume de voies larges et fiables, de la capitale aux extrémités du royaume. La « grande route de Paris à Caen », prolongée jusqu’à Cherbourg, figure parmi ses priorités.

Lire aussi : Tunnel sous la Seine, ville géante… En Normandie, ces projets fous qui n’ont jamais vu le jour

Les principes de la nouvelle voie sont simples : une chaussée large de 20 mètres (la norme pour les principaux itinéraires), deux bermes larges d’autant et surtout des lignes droites. Dessiné à la règle sur les cartes, le tracé doit relier au plus court les villes principales (Évreux, Lisieux, Caen, Bayeux, Valognes, Cherbourg), quitte à bouder de grosses localités comme Vernon, Bernay, Brionne ou le Neubourg.

Cependant, dans une monarchie aux finances exsangues, comment trouver l’argent pour engager ces grands travaux ? Orry a une idée. Ne l’ébruitez pas. Une pareille solution risquerait d’inspirer nos gouvernements, en proie aux mêmes difficultés financières.

La corvée des grands chemins

L’idée d’Orry : forcer les Français à contribuer de leurs mains à la construction et à l’entretien du nouveau réseau. Précisément, tous les hommes (enfin presque), habitants à proximité de la voie, travailleront gratuitement pour les Ponts et Chaussées. Et ce, à hauteur d’une à deux semaines par an. Au printemps et à l’automne, voilà donc les Normands occupés à transporter du pavé et du sable, à extraire du silex ou à casser des cailloux comme des bagnards de Cayenne. La mesure ne coûte rien si ce n’est le ressentiment de la population.

Conscient d’une telle impopularité, l’intendant de Caen offre, dès 1758, la possibilité d’être dispensé de cette corvée contre le paiement d’une taxe. En somme, l’État ne peut pas s’empêcher de recourir aux bonnes vieilles méthodes de financement : l’impôt.

Lire aussi : Les Normands et l’impôt : de la filouterie à la révolte

Relier Paris à Cherbourg… en trois jours

Bon an, mal an, de 1737 à 1770 environ, la route de Paris à Cherbourg est tracée, empierrée, parfois pavée, ou plantée d’arbres sur le bord. La circulation des voyageurs, des marchands et des messagers s’en trouve accélérée. Restent quelques obstacles qui ne sont levés qu’au siècle suivant : près de Carentan, la route aboutit dans l’eau de la Vire, faute d’un pont. À Notre-Dame d’Estrées, la côte, trop pentue, épuise tellement les chevaux qu’on fait parfois descendre les voyageurs du carrosse : qu’ils montent à pied !

En dehors de ces difficultés, les diligences peuvent désormais filer au galop. Sous le règne de Louis XVI, un Parisien a l’espoir de rallier Cherbourg en seulement trois jours. Encore une éternité à nos yeux. C’est au siècle suivant, avec l’arrivée du chemin de fer, que les voyageurs pourront enfin mesurer la durée du transport, non plus en journée, mais en heure.

Lire aussi : Histoire. Quand le train desservait les villages : l’âge d’or du rail en Normandie


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