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Cocaïne à Quimper : l'expérience tentée de plus en plus jeune, selon le docteur Stéphane Billard

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Stéphane Billard, médecin addictologue à la Clinique de l'Odet à Quimper.

Stéphane Billard, médecin addictologue à la Clinique de l’Odet à Quimper. (©Côté Quimper.)

La consommation de cocaïne à Quimper (Finistère) touche aussi les jeunes. C’est ce que relève Stéphane Billard, médecin psychiatre addictologue à la Clinique de l’Odet à Quimper.

Dans cet établissement de soins, le spécialiste suit notamment des patients qui souhaitent arrêter la prise de cocaïne. Avec lui, voyons les conséquences de cette drogue sur la santé.

D’après votre expérience de terrain, diriez-vous que la consommation de cocaïne augmente ?

J’ai pu constater ces cinq dernières années une augmentation du nombre de demandes de cures de sevrage et de prises en charge en hôpital de jour. Mais je ne peux en déduire que la consommation a augmenté, je peux en revanche dire que cette augmentation de la demande de soins révèle un usage plus problématique de la cocaïne. Notamment par des personnes qui ont d’autres addictions.

Je vois aussi que les consommateurs ont moins de barrière face à cette drogue qui était perçue avant comme une drogue dure et qui est à présent  considérée comme le cannabis et l’alcool. 

J’ai vu également arriver d’autres produits dérivés de la cocaïne comme le crack (cocaïne + ammoniaque ou soude caustique) dont les effets sont plus puissants mais plus éphémères et qui est plus addictif. Et des mélanges qui doublent les risques : le speed (cocaïne + héroïne), le Calvin Klein (kétamine + cocaïne).

Lire aussi : Cocaïne à Quimper : la consommation s’est-elle banalisée ?

Pensez-vous que cela constitue aujourd’hui un problème important de santé publique ?

Tout à fait, car je constate que l’expérience de la cocaïne se tente de plus en plus jeune. Ce qui prépare le terrain pour une vulnérabilité à des troubles psychiatriques et à la précarité.

 

Quel est le profil de vos patients cocaïnomanes ?

Ce sont plutôt des hommes. Des personnalités sensibles qui aiment les sensations fortes, les expériences intenses.

Lire aussi : Cocaïne à Quimper : sa consommation occasionnelle lui coûte cher

On trouve aussi des personnes qui ont des pathologies psychiatriques comme les troubles bipolaires (la cocaïne les aide à rester dans leur état d’excitation maniaque).

Les personnes qui ont une autre addiction sont aussi plus vulnérables.

J’ai vu se développer des usages professionnels dans des métiers où il faut « tenir » comme la restauration, le travail de nuit, la pêche, dans des abattoirs…

 

Quels sont les effets de la cocaïne sur l’organisme ?

Elle accélère le fonctionnement du cerveau, on réfléchit plus vite, on fatigue moins. On ressent moins les effets de l’alcool. On est désinhibé dans les relations avec les autres.

Le consommateur développe un sentiment de toute puissance qui peut le mener jusqu’à la violence. Mais quand les effets s’estompent, la fatigue est extrême.

 

Quels sont les risques pour la santé ?

À court terme, le rythme du cœur s’accélère, la température corporelle et la tension artérielle augmentent, ce qui accroît le risque cardiaque.

À long terme, la prise régulière de cocaïne entraîne de l’instabilité de l’humeur et de l’agressivité, des troubles de l’attention.

Elle produit des séquelles importantes sur le cerveau en construction des adolescents.

 

Comment se traduit le manque ?

Avec la cocaïne, le manque est davantage psychologique que physique. La première prise étant la plus intense, le consommateur en garde la nostalgie et cherche sans cesse a retrouvé les sensations de cette première fois.

 

Quelle est la principale motivation à l’arrêt de vos patients ?

C’est un produit pour lequel les consommateurs ont du mal à réaliser les effets négatifs. Ce qui peut motiver l’envie d’arrêter, c’est le coût de cette drogue, le surendettement, l’implication dans le trafic…

 

Comment les cocaïnomanes sont-ils pris en charge pour décrocher ?

La difficulté, c’est qu’il n’y a pas de traitement de substitution. La prise en charge est psychologique, il faut aider le patient à trouver les motivations pour arrêter.

Nous pouvons proposer des cures de sevrage de quatre semaines (plutôt à des personnes en situation précaire, qui ont des troubles mentaux associés ou d’autres addictions), parfois avec une aide médicamenteuse pour diminuer l’angoisse de l’arrêt.

Nous suivons les gens jusqu’à au moins un an d’abstinence.

 


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