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Yvelines. A Auffargis, le chef pâtissier Jean-Christophe Jeanson est devenu Meilleur Ouvrier de France

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Jean-Christophe Jeanson, Meilleur ouvrier de France en pâtisserie 2018.

Jean-Christophe Jeanson, Meilleur ouvrier de France en pâtisserie 2018. (©Lenôtre)

C’est gagné ! Jean-Christophe Jeanson, le chef pâtissier de la maison Lenôtre est sacré Meilleur Ouvrier de France en pâtisserie. Habitant à Auffargis depuis 16 ans, il nous livre un témoignage fort depuis son sacre tant attendu. Le jour où Jean-Christophe Jeanson a aidé son père, restaurateur, à réaliser une pièce montée pour un événement, ce fut le déclic. Après avoir quitté l’école à l’âge de 14 ans, il lâche tout pour se dédier à la pâtisserie. Il a travaillé chez plusieurs traiteurs parisiens, comme Raynier Marchetti, Flo Prestige, puis à la maison Lenôtre à Plaisir, dans les Yvelines. Après plus de 30 ans de carrière, il est aujourd’hui Meilleur Ouvrier de France (MOF) en pâtisserie depuis cet automne.

En quoi devenir Meilleur Ouvrier de France était important pour vous ?

Être chef pâtissier dans une maison d’une telle renommée représente un certain poids. Lenôtre est la maison d’excellence à la française. Je n’étais pas à l’aise de la représenter sans être couronné de l’excellence de notre métier. J’ai donc décidé de passer le MOF alors que je n’avais jamais fait de concours. C’est pour cela que je l’ai raté la première fois en 2015, je n’étais pas prêt. C’était indispensable de l’avoir donc je l’ai repassé.

Comment se passent les entraînements ?

En 2012, je n’avais jamais travaillé le sucre ou le chocolat, j’étais un pur pâtissier et pas un artiste. Cette fois-ci, j’ai travaillé tous les soirs, tous les week-ends et toutes les vacances pendant trois ans. Ça demande beaucoup de sacrifices.

Comment l’ont vécu vos proches ?

C’était très compliqué, mais j’ai la chance d’avoir une femme et deux fils exceptionnels. Ils m’ont donné une force qui est parfois difficile à trouver à 52 ans. La maison Lenôtre m’a aussi beaucoup soutenu. Avec tout ce soutien, j’étais obligé de réussir. Lorsque je suis revenu la première fois sans le col-bleu blanc rouge, c’était très compliqué. J’étais écœuré et je voulais tout abandonner. C’est ma femme qui m’a poussé à le repasser. Si elle ne m’avait pas encouragé, je ne lui aurais pas imposé de revivre ça. C’est grâce à ça que nous sommes encore ensemble. Il y a beaucoup de femmes qui vivent très mal cette expérience et qui finissent par divorcer. J’espère qu’un jour, une femme d’un passionné écrira quelque chose pour conseiller les épouses et les prévenir de ce qu’elles vont vivre.

Quelles sont les principales qualités à avoir pour devenir MOF ?

Il faut avoir une volonté à toute épreuve, une grande énergie, un savoir-faire minimum, l’humilité, une très large ouverture d’esprit et une capacité de remise en cause journalière. La transmission compte beaucoup. Il faut aimer les autres et être toujours respectueux.

Jean-Christophe Jeanson, chef pâtissier chez Lenôtre est aujourd'hui Meilleur Ouvrier de France en pâtisserie. Lors de sa visite dans une plantation de cacao, son visage a été barbouillé de cacao.

Jean-Christophe Jeanson, chef pâtissier chez Lenôtre est aujourd’hui Meilleur Ouvrier de France en pâtisserie. Lors de sa visite dans une plantation de cacao, son visage a été barbouillé de cacao. (©Caroline Faccioli)

Si vous deviez résumer cette expérience ?

Extraordinaire. Je conseille à tous les passionnés de n’importe quel domaine, de viser l’excellence à ce niveau. On redécouvre notre entourage que ce soit professionnel, amical ou familial. On va chercher un savoir auquel on n’aurait jamais pensé. Cela nous oblige à changer et à avoir une nouvelle perception des choses. On ne s’arrête pas à dire : je vais faire un gâteau. Mais : pourquoi je vais le faire ? Pourquoi de cette façon, avec ce parfum ? Tout doit avoir du sens.

Comment avez-vous vécu votre victoire ?

C’était un truc de fou. Ma famille était sur place. C’est eux qui m’ont fait pleurer, j’en ai encore des frissons. Lorsqu’ils ont annoncé mon nom, plus rien ne comptait, ni les journalistes, ni les MOF, je n’avais qu’une envie c’était d’aller voir ma femme et mes deux fils. C’est une violence émotionnelle que je ne peux même pas expliquer, mais c’est aussi une délivrance de tous ces sacrifices. C’est à partir de là que tout commence.

« J’en ai encore des frissons »

Vous êtes ensuite parti en Chine et au Ghana, comment se sont passés vos voyages ?

Je suis allé à Shanghaï pour faire une démonstration au plus grand salon de la pâtisserie. Tout est démesuré là-bas. Quand on part dans des pays étrangers, il faut être carré dans sa préparation, si on oublie un truc, c’est mort. C’était une très belle expérience que j’espère pouvoir refaire. Je suis ensuite parti au Ghana. On a visité les plantations, rencontré les planteurs de cacao et rendu visite à des élèves. On leur a ramené les bonbons entourés de leur chocolat. Quand on est au milieu de la brousse avec les enfants, c’est extraordinaire, c’est plus que dépaysant. Il y a beaucoup de misère là-bas, quand on rentre en France, on se rend compte de la chance qu’on a.

Comment envisagez-vous l’avenir ?

Je veux continuer de chercher ce que l’on a jamais trouvé. Il faut trouver l’idée la plus ingénieuse possible. Remettre en cause la pâtisserie d’aujourd’hui c’est un vrai challenge. Il faut qu’elle soit de plus en plus désucrée, dégraissée, pour que demain il n’y ait plus de complexe à manger une pâtisserie à la place d’un yaourt. Quand on aura réussi ça, on ne verra plus la pâtisserie comme un plaisir exceptionnel mais comme un plaisir journalier.

Propos recueillis par Margaux Bourgasser


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