
Installée à Thaon, Pauline Ruiz restaure les tableaux historiques, ici à Ifs en fin de semaine.
À Ifs, près de Caen (Calvados), le tableau « Le martyr de Saint-André » a retrouvé sa place dans l’église du même nom en ce mois de septembre 2019. 135 ans après sa disparition !
« Un passeur pour que le patrimoine perdure »
Jeudi 12 septembre 2019, Pauline Ruiz s’est occupée de lui faire une dernière beauté avant d’être exposé aux habitants de la commune.
Notre métier consiste à être un passeur afin que le patrimoine perdure », soupire la jeune femme de 36 ans. « On peut toujours faire quelque chose pour une œuvre.
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Toulousaine de naissance, Pauline Ruiz exerce dans le Calvados comme restauratrice peinture de tableaux anciens depuis cinq ans. Après s’être formée à l’école de Condé à Paris, Pauline s’est installée à Thaon. « Je travaille pour les monuments historiques, des particuliers ou des musées, mais 60 % de mon activité concerne des tableaux des monuments historiques ».

Accompagnée de la stagiaire Louise, Pauline Ruiz a restauré ce tableau de 1610 à Ifs, près de Caen (Calvados). (©Grégory Maucorps/Liberté le bonhomme libre)
« Les tableaux de 400 ans sont mieux peints que les récents »
Pour restaurer « Le martyr de Saint-André » à Ifs, Pauline, accompagnée d’une stagiaire Louise, a commencé par s’occuper des bandes collées par le restaurateur du bois pour protéger le mastic de l’œuvre. En effet, ce tableau datant de 1610 est une huile sur bois, du mastic a donc été mis entre les lames de bois pour permettre à l’œuvre originelle de traverser les siècles « car le bois bouge tout le temps ».
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Délicatement, à l’aide d’une éponge douce, elle retire ces bandes, une à une. Puis vient la phase de la colle pour remettre en place des écailles du tableau en soulèvement. La restauratrice s’attelle ensuite à mastiquer les lacunes avant d’effectuer des retouches ponctuelles de peinture en vue d’une harmonisation de l’ensemble. « L’œuvre était en bon état quand même, bien peinte ». Au total, une demi-journée de travail à deux a été nécessaire pour y parvenir.
Est-ce difficile de s’occuper de tableaux comme « Le martyr de Saint-André » vieux de 409 ans ?
Non, c’est même plus facile car ils sont mieux peints que certains plus récents, explique Pauline Ruiz. Les matériaux sont moins sensibles, il s’agit de bon bois, du chêne. À l’époque, les peintres suivaient le principe de base, du gras sur maigre, et les tableaux étaient bien préparés. Les tableaux récents sont plus sensibles, moins bien peints car il y a une mauvaise superposition des couches.

Petite retouche de colle sur ce tableau de 1610 « Le martyr de Saint-André », à Ifs. (©Grégory Maucorps/Liberté le bonhomme libre)
Un métier minutieux
Attirée par les puzzles, la science et l’histoire de l’art, Pauline Ruiz a découvert le métier de restaurateur. « C’est un métier minutieux, chirurgical, dans les détails et j’aime ça », confie-t-elle. « Je préférais le dessin à la peinture, mais je déteste créer. Pour être restaurateur, il faut des notions mais pas besoin d’être créateur ». Son objectif : masquer les lacunes du temps, comme un vernis qui jaunit ou qui blanchit, pour permettre au public de découvrir une œuvre telle qu’elle était à l’époque de sa création.
Je suis là pour gommer le temps qui passe…
Ce week-end, samedi et dimanche (10h-18h), Pauline Ruiz présentera son métier de restauratrice, comme une quinzaine d’autres artisans, à l’occasion des Journées du patrimoine à l’Abbaye de Longues-sur-Mer. Prochainement, elle travaillera notamment à la restauration d’un tableau de la cathédrale de Bayeux.