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Seine-et-Marne. Les abeilles, ouvrières à emploi précaire

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En Ile-de-France, 33 espèces d'abeilles sur 374 n'ont pas été observées depuis les années 80 et sont considérées comme disparues

En Ile-de-France, 33 espèces d’abeilles sur 374 n’ont pas été observées depuis les années 80 et sont considérées comme disparues (©Illustration – Pixabay)

Elles inspirent confiance et sont perçues dans l’imaginaire collectif comme d’infatigables travailleuses pacifistes et indispensables au bon fonctionnement de notre planète. Et pour cause.

Avec les autres pollinisateurs comme le bourdon ou le papillon, les abeilles garantissent 75 % de la production mondiale de nourriture, dont environ 90 % des arbres fruitiers. « Le principe est simple : dès qu’il y a fruit, il y a fleur, rappelle Reynald Renault, gérant de l’exploitation provinoise La Ronde des abeilles. Et qui « féconde » les fleurs ? Les abeilles, en grande majorité. »

Et les chiffres sont inquiétants. Selon le rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec) publié le 6 mai dernier, 40 % des espèces d’insectes sont en déclin, et 10 % sont menacés de disparition. La Fédération française des apiculteurs professionnels va même plus loin : 400 000 ruches françaises n’ont pas passé l’hiver 2018, soit trois fois plus qu’en temps normal.

Lire aussi : Seine-et-Marne. Pins et hêtres dépérissent dans le massif de Fontainebleau

Sur les hauteurs de de la cité médiévale, Reynald Renault possède depuis 30 ans une trentaine de ruches d’abeilles noires. Il confirme : « Il y a 10-15 ans, nous faisions trois récoltes par an. Aujourd’hui, si nous parvenons à en faire deux bonnes c’est le maximum. »

« Le frelon a décimé 1/3 de mes ruches »

En cause ? Le cocktail « changement climatique-pesticides-nuisibles ». « Les fortes chaleurs empêchent le nectar de remonter dans les fleurs, les abeilles ne peuvent donc pas se nourrir, observe l’agriculteur de Provins. La production s’en ressent et on arrive à des essaims de plus en plus petits. »

Apiculteur du côté de Sénart, Cyril Lesecq ne dit pas autre chose : « En 2018, on a eu 76 jours sans pluie. Cette année la sécheresse impacte aussi la récolte, on produit trois fois moins que l’an dernier. Sans eau, pas de nectar et pas de miel. »

Si le Sénartais et le Provinois enregistrent annuellement une mortalité de 20 % à 30 %, conforme à la moyenne nationale* (les abeilles ont une durée de vie de 40 jours), un nuisible leur pose néanmoins problème. Arrivé en France en 2004 dans des poteries venues de l’est, le frelon asiatique est un malheureux symbole de la mondialisation. Il attaque les abeilles pour nourrir ses larves et s’approvisionner en miel.

Lire aussi : Seine-et-Marne. Le Provinois renforce sa lutte contrele frelon asiatique

L’an dernier, il a décimé un tiers des ruches de Reynald Renault : « Cette année, je suis plutôt tranquille. Mais le frelon arrive souvent mi-août, il faut donc rester prudent », estime le Provinois. Face à ce fléau, pas grand-chose à faire. Certains apiculteurs posent des pièges « bouteille » pour noyer l’insecte, d’autres s’équipent plus lourdement, et chèrement : « J’ai posé des harpes électriques qui grillent les frelons, confie Cyril Lesecq. C’est environ 200 € la harpe, soit le prix de 25 kg de miel. »

« Diversifier ses parcelles »

D’une manière générale, les apiculteurs en appellent au bon sens. « Inutile de jouer les apprentis sorciers en croisant les espèces pour gagner en productivité, prévient Reynald Renault. Ça peut affaiblir les essaims ou les rendre plus agressifs. Si une espèce se trouve à un endroit précis, c’est qu’il y a une raison. »

Concernant les pesticides, dont les néonicotinoïdes sont interdits en France depuis le 1er septembre 2018, les comportements semblent évoluer : « A la campagne, ça peut être un problème, pas en ville ou en forêt, assure Cyril Lesecq. Mais lorsque vous avez un champ sans coquelicot, c’est qu’il y a un problème. Évitez de mettre vos ruches à côté. »

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L’an dernier, la France a produit 22 000 tonnes de miel, contre 33 000 il y a 30 ans (©Illustration – Pixabay)

Pour son homologue provinois, on doit être capable de s’en passer : « Il faut replanter des arbres à fleurs, créer des haies, diversifier ses plantes sur une même parcelle. J’ai la chance d’avoir une jachère à côté de mes ruches, il y a des insectes, de la vie. Quand on laisse faire, la nature reprend ses droits. » 

Un retour aux pratiques qui existaient il y a plus de 30 ans. À l’époque, la France comptait 1,3 million de ruches, autant qu’aujourd’hui. Mais elle produisait 33 000 tonnes de miel par an, contre seulement 22 000 tonnes l’an dernier.

*Chiffres du ministère de l’Agriculture, calculés sur 5 mois, entre octobre et février.


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