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En Loire-Atlantique, ces agricultrices montent sur scène par amour pour leur métier

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Les agricultrices ont suivi des ateliers menés par la comédienne professionnelle Blandine Massard.

Les agricultrices ont suivi des ateliers menés par la comédienne professionnelle Blandine Massard.

Depuis plusieurs mois, 9 agricultrices de Loire-Atlantique répètent des saynètes extraites de leur quotidien professionnel. Dans un métier où la vie professionnelle est mêlée à la vie personnelle, elles y expriment le bonheur d’effectuer ce métier mais aussi sa pénibilité, leurs revendications ou encore le regard des hommes. Encadrées par Blandine Massard, comédienne professionnelle, elles joueront le samedi 5 octobre dans le cadre de l’événement « Femmes en fermes » qui se tiendra à Vieillevigne. Avec une pure sincérité.

Elle a tout noté. Depuis 2014, Emilie Serpossian retranscrit sur papier ce qu’elle entend dans ce groupe de femmes qu’elle anime. Des agricultrices du Civam 44 (centre d’initiatives pour valoriser l’agriculture et le milieu rural) dont elle est une confidente privilégiée : des coups de blues aux éclats de rire, en passant par des témoignages forts. En 5 ans, ce qui avait été pensé par deux femmes, juste installées en élevage bovins laitiers à l’aube de la quarantaine et qui s’étaient revues lors d’une formation cinq ans plus tard, pour évoquer les difficultés, appréhensions et doutes qu’elles avaient chacune rencontré, a pris forme.

Un métier au féminin

Plus de 30 femmes sont passées dans ce groupe de paroles et de formations (aussi bien sur la conduite de tracteur que sur la préservation du dos et le travail en couple et la gestion du stress). Une équipe à géométrie variable en raison des départs en retraite, des maternités et des évolutions professionnelles. Une petite dizaine reste assidue.

De ses carnets, la coordinatrice en a fait des saynètes. Depuis qu’en fin d’année dernière, prenant le taureau par les cornes, elles ont émis l’idée de raconter ce qu’est leur profession au grand public. Sous la forme d’une pièce de théâtre. Un projet fou qui a pris un peu plus forme au printemps avec l’accompagnement de Blandine Massard, directrice artistique de la troupe 100 trucs ni muche. Une manière d’être le plus explicite possible. Le plus sincère aussi. Les répétitions se succèdent et le trac s’amplifie.

Le samedi 5 octobre, elles joueront dans le cadre de la journée « Femmes en fermes », à Vieillevigne, dont le but sera d’expliquer leur rôle et leur place sur une exploitation pour changer les mentalités. Elles ont entre 32 et 57 ans, sont de Saint-Aubin-des-Châteaux, Machecoul, Fégréac ou encore Vieillevigne et Saint-Philbert-de-Bouaine, et œuvrent dans la production laitière (sauf une, en maraîchage) : elles sont toutes devenues des comédiennes pendant plusieurs mois.

En neuf tableaux, elles expriment leurs peines et leurs joies, leurs angoisses et leur attraction pour ce métier, leurs gênes et leurs aisances. Uniquement sur la base de leurs témoignages.

« Elles expriment aussi bien leur amour pour leur métier que les difficultés à s’y faire une place », résume Emilie Serpossian.

Leurs tranches de vie

« Ce sont des tranches de vie ». Parfois graves, lorsque ces femmes racontent les moments où elles ont été confrontées à des difficultés économiques. « Dans 9 cas sur 10, ce sont les premières à ne pas être dans le déni et à tirer le signal d’alarme », précise l’animatrice. Parfois incommodantes quand certaines racontent comment elles se font ouvertement et lourdement draguer ou le machisme de certains hommes. Parfois tristement réaliste quand elles évoquent la dépendance à leur mari en raison du statut de conjointe collaboratrice. « Ultra-précaire même si cela permet de faire des économies à l’exploitation », ajoute Mathilde Roger, productrice de lait en bio à Avessac qui a connu cette position après sa reconversion professionnelle (elle était responsable logistique dans le transport).

Les agricultrices monteront sur scène ce samedi 5 octobre.

Les agricultrices monteront sur scène ce samedi 5 octobre. (©Hebdo de Sèvre et Maine)

Parfois volontairement ironique pour évoquer leur quotidien professionnel qui se mêle à la vie familiale. « Quand on est de 6 h à 20 h sur l’exploitation avec la maison à côté, quasiment sept jours sur sept, tout est imbriqué. On peut très bien parler de vêlage et de traite à table avec les enfants », sourient Annie Ong et Michelle Heuze, agricultrices à Machecoul et Fégréac. De drôles de scènes en effet.

Mais ce groupe de femmes n’aura pas attendu cette pièce pour faire évoluer les choses. D’abord vis-à-vis d’elles-mêmes. « Elles ont toutes gagné en confiance en soi. Certaines étaient extrêmement timides quand elles ont intégré le groupe. Elles n’osaient pas parler. Demain, ce sont elles qui seront sur scène, » constate Emilie Serpossian.

D’autres ont fait en sorte de cloisonner les temps de travail et les temps familiaux, organisant des réunions même au sein d’un couple d’exploitant, en dehors des temps personnels. Certaines ont même réussi à partir en vacances en amoureuse et sans enfants. Enfin, plusieurs n’hésitent plus à donner leur avis sur l’avenir de leur exploitation (agrandissement ou pas, conversion ou pas…).

« Elles parlent vrai »

Les huit formations ont eu leurs bienfaits. « Cela a été bénéfique pour nos exploitations. Et le fait qu’on soit qu’entre filles nous a permis de nous exécuter et de prendre la parole plus facilement. Sans la peur du regard des hommes. Et de savoir faire au cas où », indique Mathilde Roger. « Un kiné est même venu sur leur terrain leur enseigner les bonnes postures : comment repousser l’ensilage ? Comment prendre une botte de foin avec une fourche ? Comment fermer une lourde barrière ? Comment conduire un tracteur ? »

Ces agricultrices montrent s’il en était besoin que « ce métier n’est pas genré ». « Il faut se souvenir qu’après la guerre, ce sont les femmes qui ont tenu les fermes. Or, il y a cette virilité qui fait qu’on pense que la profession est masculine. Mais elle peut très bien s’adapter aux femmes. La preuve. Et elles n’ont pas à être cantonnées, sauf si elles le souhaitent, à la traite et la comptabilité, » exprime Emilie Serpossian.

Ces femmes ne sont pas comédiennes professionnelles, mais parleront vrai. Et c’est l’essentiel ».

« FEMMES EN FERMES »
Le samedi 5 octobre à la ferme des hirondelles à Vieillevigne. Le thème central de cette journée : s’interroger sur les stéréotypes féminins et masculins dans le milieu agricole et la ruralité !  Au programme : à 14h – Accueil et expositions mêlant Agriculture Durable et lutte contre le sexisme, stands d’associations partenaires; 16h, Visite de ferme; à 17h30, Débat avec invités (Atelier Paysan, FNAB, Solidarité Paysan, Solidarité Femmes, agricultrices en systèmes économes autonomes); à 19h30 – Repas-spectacle (pièce de théâtre écrite et interprétée par le Groupe femmes du Civam défis – Concert de « Las Mariposas« ). Prix libre, sur réservation ici

 


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