
35 femmes battues ont franchi le seuil de la porte du dispositif d’accompagnement de femmes victimes de violences à Vire Normandie en 2018. (©La Voix Le Bocage)
« Dans l’idéal, il y aurait besoin d’un appartement supplémentaire. Sans parler des moyens pour gérer les placements de courtes durées qui pourraient être rehaussés », affirme la chargée de mission pour l’égalité entre les femmes et les hommes pour l’association l’Étape de Vire Normandie.
Alors que le Grenelle contre les violences conjugales s’est ouvert début septembre, la situation au sein du Bocage et de Vire Normandie n’est pas rose. En effet, l’Étape, dans le cadre du Plan régional pour l’égalité entre les femmes et les hommes, coordonne le dispositif d’accompagnement de femmes victimes de violences conjugales sur Vire Normandie et ses environs par le biais d’un accueil, une écoute, une orientation. Et ce, depuis 2007.
En octobre 2017, en concertation avec les membres du dispositif, un appartement d’urgence pour femmes battues, un bien immobilier appartenant à la ville, a été mis à disposition.
Gratuit pour les personnes sans revenu, il est à 1 € par mois pour les bénéficiaires du RSA. Il revient à 10 % des revenus pour les occupants au salaire plus élevé. »
Le passage dans cette habitation ne doit pas dépasser les 2 à 3 mois : « Tant que la personne ne se défile pas dans ses démarches pour retrouver un logement, s’éloigner de son bourreau, elle peut continuer à profiter de ce lieu de repos. »
Toutes classes sociales
Sur l’année 2018, la coordinatrice de l’Étape a recensé 35 situations différentes, avec des rendez-vous d’une heure à la clé. « C’est sans compter l’ensemble des appels, une écoute qui peut parfois s’avérer utile. »
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Les femmes qui franchissent le seuil de sa porte peuvent être issues de toutes sortes de classes sociales. Allant des personnes sans réserve financière, « les cas les plus fréquents », aux personnes de la classe dite supérieure.
C’est souvent difficile pour ces femmes. Leurs conjoints sont reconnus socialement et quand elles osent parler des violences au sein du couple, elles ne sont pas prises au sérieux. L’entourage ne peut pas y croire. »
7 allers-retours
Après 12 ans à traiter ce type de dossiers sur Vire, elle a pu dresser un profil bien défini des bourreaux. Des appels à l’aide peuvent arriver des Monts-d’Aunay ou encore de Noues-de-Sienne :
Ce sont souvent des charmeurs, qui offrent à leur compagne de nombreux cadeaux, des vacances. C’est un mécanisme vicieux, car ils reviennent en demandant le pardon, avec des excuses. Il faut, en général, 7 allers-retours pour que la femme parte définitivement. Un coup violent est souvent synonyme de déclic. »
En ce mois de septembre 2019, les cas continuent de s’accumuler : « Certains sont particulièrement complexes », explique la chargée de mission, qui souhaite garder l’anonymat pour des raisons de sécurité. « Les risques pour ces femmes sont permanents. »
C’est la raison pour laquelle des moyens supplémentaires sont demandés. Depuis plusieurs années, des référents sont formés, tels que des médecins, des gendarmes, des bailleurs… Le but étant d’identifier les signes avant coureurs. « Nous n’avons pas attendu le Grenelle pour tenter de faire bouger les choses. Dans un milieu rural, on est obligés de se débrouiller. C’est l’aspect financier qui fait défaut. »
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Des gîtes, pour héberger sur de courtes périodes, sont aussi mis à disposition. « Pas plus d’une semaine, car cela nous coûte très cher. » En décembre 2017, l’Espagne a ratifié le pacte d’État contre la violence de genre, avec un budget d’1 milliard d’euros sur 5 ans.
Il y a eu 46 féminicides dans ce pays cette année, contre 105 en France pour le moment. Comme quoi… »
Les violences conjugales ne touchent pas que les femmes. Un aspect qu’il ne faut pas oublier, car, même si les hommes sont peu nombreux, la gérante du dispositif a pu constater 4 cas en 12 ans, « dont un en septembre qui vient d’intégrer l’hébergement d’urgence à Vire. »