
Après un brillant parcours d’études, Kevin Ruven vit une très belle aventure à travers ce détachement professionnel de 3 ans sur le seul port spatial européen. Le décollage de la fusée Ariane (photo), un moment toujours chargé de magie, d’émotion et de stress pour les techniciens du centre spatial guyanais. (©http://www.arianespace.com/)
Une belle aventure et l’aboutissement d’un rêve. En 2018, le Rislois Kevin Ruven, petit-fils du maire de Saint-Symphorien (Eure), aujourd’hui âgé de 29 ans, a débuté une mission professionnelle d’une durée minimum de 3 ans au centre spatial guyanais de Kourou. Une opportunité saisie avec bonheur par ce salarié de l’entreprise Europropulsion, spécialisée dans l’assemblage final des lanceurs Ariane 5 et Vega.
Un technicien bardé de diplômes
Originaire de Saint-Germain-Village, Kevin Ruven a fréquenté l’école communale locale avant d’étudier successivement aux collèges pont-audemériens Pierre et Marie-Curie puis Saint-Ouen. Le cursus étudiant se poursuit ensuite au lycée Risle-Seine où Kevin obtient un BEP en Génie Electrotechnique puis un bac STI dans la même branche. Il explique :
« J’ai ensuite intégré, durant un an, à raison d’une semaine par mois, le CFA Métiers de l’aérien, à Massy-Palaiseau, avant de passer un bac Pro à orientation Mécanicien Système Cellules en 2010. »
Parallèlement à ses études en région parisienne, le jeune homme, assoiffé de savoir et de connaissances, a pris des cours au lycée Marcel Sambat de Sotteville-les-Rouen (Seine-Maritime) et a travaillé en alternance chez Goodrich à Saint-Marcel, près de Vernon. Et pourquoi ne pas alors tenter un BTS en Industrialisation des Produits Mécaniques, au CFA La Châtaigneraie de Mesnil-Esnard, la pratique se réalisant à l’entreprise M2P des Baquets ? Poursuivant sur sa lancée – normal pour quelqu’un qui allait travailler par la suite sur les lanceurs ! -, le jeune Kévin se lance donc dans une licence de Technicien Préparateur Méthodes Aéronautique et Aérospatial au CESI de Mont-Saint-Aignan, le volet pratique de l’enseignement se déroulant à la SNECMA de Vernon. Nous sommes alors en 2013.
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En possession d’un éloquent curriculum vitae, Kevin intègre alors, en intérim, cette dernière entreprise en qualité de préparateur méthodes sur le montage des moteurs de satellites, « le prototypage des nouveaux moteurs et leur industrialisation ». En 2014, il est pris en CDI dans la fonction de gestion de production de moteurs plasmiques puis technicien méthodes sur les moteurs Vulcain 2 de la fusée Ariane. Une propulsion professionnelle percutante qui a abouti, en 2018, à un détachement choisi de 3 ans minimum au centre spatial guyanais de Kourou.

Le décollage de la fusée Ariane: un moment toujours chargé de magie, d’émotion et de stress pour les techniciens du centre spatial guyanais. (©http://www.arianespace.com)
Une expérience hors du commun
Le spatial a de moins en moins de secrets pour ce technicien normand qui occupe aujourd’hui la fonction d’inspecteur contrôle qualité chez Europropulsion, comme l’explique Kévin Ruven.
« Ici, nous sommes au cœur de l’assemblage final des boosters des lanceurs Ariane 5 qui peuvent emporter jusqu’à 10 tonnes de matériels, et des lanceurs Vega, plus modestes, qui eux, ne peuvent charger qu’un poids de 2,3 tonnes. »
Logé à Kourou, une ville de 26 500 habitants en Guyane, Kevin Ruven est fier de travailler dans le seul port spatial européen qui s’étale sur une surface de 69 000 ha, emploie 1 700 salariés et génère 4 600 emplois.
« J’ai déjà assisté à 6 lancements à partir de sites d’observation qui se trouvent à des distances comprises entre 5 et 20 km du pas de tir. C’est impressionnant : le sol tremble, on entend des crépitements et une véritable boule de feu s’élève dans les airs à une vitesse de 2 km par seconde ».
Il faut dire que la masse au décollage s’affiche à 750 tonnes et que la poussée totale de l’ensemble est de 1 440 tonnes ! Un véritable feu d’artifice que l’on peut suivre dans les airs durant environ 2 minutes.
Après les différentes séparations de la fusée, un satellite est placé en orbite à une altitude avoisinant les 36 000 km. Des chiffres étourdissants et des techniques d’avant-garde au cœur de ce bout de France occupé à 97 % par la forêt : « C’est le poumon de la terre, ce territoire coincé entre le Suriname et le Brésil. Ici le tourisme demeure encore modeste, l’industrie non spatiale est peu développée mais le sol recèle des gisements d’or et de métaux rares ». Une super-expérience pour cet habitué des régions tempérées qui vit aujourd’hui dans une contrée présentant un taux d’humidité de 90 % et une température moyenne avoisinant les 35 degrés maximum. « Cela ne me dérange pas. J’aime aussi ce mélange de cultures, les Brésiliens étant nombreux dans ce morceau de France ».
Quand s’achèvera cette mission de 3 ans, Kevin Ruven aura sans doute la possibilité de prolonger son détachement : « Cela dépendra du renouveau spatial, la concurrence étant forte et pas toujours égalitaire, avec Space X d’Elon Musk, notamment ». En attendant, il y vivra l’arrivée d’Ariane 6 prévue en 2020. Et cela devrait encore faire les beaux jours de cet expatrié friand de technique, d’espace et également de sport automobile.
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De notre correspondant, Pierre Lecocq