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De nombreux maires ont notamment décidé de ne pas se représenter lors des élections municipales de mars 2020. (©Illustration/Actu.fr)
Des écharpes tricolores derrière un cercueil. L’image a chamboulé la France. Un maire est mort dans l’exercice de ses fonctions. Un simple dépôt de gravats lui a coûté la vie. Les contrevenants ont refusé d’être verbalisés. Une banale affaire de décharge sauvage (et illégale) s’est transformée en tragédie nationale. Une enquête est en cours. La justice va passer et reconstituer les circonstances du drame.
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Le maire préféré, le député détesté
Pour le moment, la qualification retenue est celle d’un « homicide involontaire ». Mais, au-delà de l’affaire, c’est tout un pays qui, en pleine torpeur estivale, s’indigne et s’interroge. Le maire reste l’élu préféré des Français. La détestation des députés ou ministres existe depuis des années. Mais les représentants de nos communes restent populaires. Surtout en milieu rural, ils restent les interlocuteurs du quotidien. Naissance ou décès, état des routes et installations sportives, les maires jalonnent la vie des habitants. Cette (ultra) proximité leur assure une vraie popularité.
361 agressions en 2018
Mais le décès brutal du maire de Signes, dans le Var, éclaire une autre réalité. Les chiffres du ministère de l’Intérieur montrent que les agressions ne sont pas « massives » : 361 en 2018. C’est, bien évidemment, un nombre inadmissible. Toute violence est condamnable. Particulièrement lorsqu’il s’agit de personnes qui se consacrent à l’intérêt général et sacrifient soirées et week-ends au service des autres. Cela étant, il faut mettre en parallèle les quelques centaines d’agressions et les 36 000 maires de France et de Navarre. Encore une fois, une seule agression est une agression de trop.
Plus de violence
Mais l’émotion (même légitime) ne doit pas occulter les questions de fond. Le malaise des maires n’est pas « principalement » lié à la violence. Les témoignages pointent également les « incivilités » et la c… ordinaire. Les insultes fusent facilement et la grossièreté n’est pas réservée à la conduite automobile. Tout cela ne finit en dépôt de plainte et n’est pas consigné dans les registres des commissariats.
Mais les administrés se comportent mal et font preuve d’une exigence digne d’un Prince de sang. Notre société est devenue une société de consommateurs, individualistes et capricieux. La vie municipale n’échappe pas à cette (fâcheuse) tendance. L’immense majorité des maires perçoivent de maigres indemnités.
Crainte sur les municipales de 2020
En revanche, certains de nos contemporains ne sont pas avares d’ingratitude et parfois d’agressivité. Les maires en souffrent. Ce n’est pas pour rien que beaucoup raccrochent l’écharpe tricolore. Ils ne vont pas se représenter aux prochaines municipales.
Malheureusement, ce sont généralement les plus méritants. Les maires des grandes villes bénéficient d’une « protection institutionnelle » : des services qui font « tampons » avec les administrés, voiture de fonction et « vraies » indemnités.
En revanche, les élus des petites communes sont en première ligne. Leur engagement est « total ». Les administrés vont sonner à leur porte pour une poubelle renversée et ils doivent annoncer les accidents de la route aux familles.
La « lessiveuse » des communautés de communes
Depuis des années, Paris leur enlève des prérogatives et les a « noyés » dans des regroupements de communes. Quand il n’est pas malmené par ses administrés, le maire rural est plongé dans la lessiveuse des communautés de communes. Au fil du temps, il est devenu un « bras qui se lève » pour voter au sein des structures intercommunales. La décentralisation a supprimé la tutelle du préfet. Elle l’a remplacé par une autre forme de tutelle : celle des grands élus sur les petits. La France bénéficie d’une richesse : ses maires ruraux.
Espèce en voie de disparition
Les gouvernements de gauche et de droite (sans parler de Bercy et de la baisse des dotations) ont ruiné ce « trésor ». L’urbanisation à outrance et l’obésité des métropoles suscitent un retour vers les campagnes et les villes moyennes. De plus en plus de citadins quittent la ville et s’installent dans des territoires à taille humaine, sans embolie des transports et avec une qualité de vie. Malheureusement, ils trouvent des espaces ou une « espèce » est en voie de disparition : les maires ruraux.
Laurent Dubois